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Le care manager, métier d’avenir ?

Chacun porte son histoire, se remémore les faits marquants de son parcours. À tout moment — et sans sommation préalable — n’importe quels événements, gestes ou simples stimulations peuvent faire ressurgir un souvenir du passé, rappelé à sa mémoire pour vous aider à gérer le présent en fonction d’une expérience vécue.

J’ai récemment refait cette expérience. Quand on m’a demandé de creuser le sujet du Care Manager, je me suis soudainement souvenu de Monsieur Montaigu, mon professeur de philosophie en classe de terminale. M. Montaigu nous apprenait à interroger les énoncés, à questionner les présupposés et sous-entendus de toute affirmation. 

Et il en va ainsi de notre propos, le Care Management.

Avant même d’analyser en profondeur les mythes et réalités de ce nouveau métier, on peut commencer par s’interroger sur cette dénomination qui pose comme acquis que les soins (care) soient prédisposés à une gestion organisée (management).

Cela va-t-il vraiment de soi ?

Ne pensons-nous pas communément qu’apporter des soins à quelqu’un soit une action qui mobilise une énergie spontanée, émotionnelle et, avouons-le, instinctive et désorganisée ?

Ce nom de Care Manager n’est donc pas neutre, et les rédacteurs du rapport El Khomri ont bien compris :

  • Cette nécessité de décrire une réalité nouvelle,
  • L’urgence d’adopter une démarche rationnelle par rapport aux défis de la longévité,
  • et la nécessaire professionnalisation des services pour un minimum d’efficacité collective.

Une exploration un peu raisonnée du sujet s’impose et Sweet Home s’est mis en quête des meilleures informations, afin de vous livrer une synthèse complète d’un sujet brûlant !

Au départ, il y a les aidants et l’entreprise

Selon l’Enquête Handicap-Santé auprès des aidants informels, 8,3 millions de personnes s’occupent au quotidien d’un proche en situation de dépendance, dont 3,6 millions auprès de personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile. 68 % d’entre eux exercent une activité professionnelle (ce qui représente environ 2 salariés sur 10, une proportion qui a doublé en 10 ans), qui mobilise naturellement une part importante de leur énergie. 

Bien que les proches aidants apportent souvent leur aide avec bonté et empathie, les responsabilités peuvent se révéler pesantes à la longue. Lorsque cette charge s’ajoute à une vie de famille bien remplie (vous avez des enfants ?) et à la vie active, s’occuper d’un proche en perte d’autonomie peut constituer une source de stress considérable. De plus, ces situations particulières peuvent régulièrement impacter la vie professionnelle des aidants. 

Aller plus loin : notre article consacré à la charge mentale des aidants paru sur Le Média Audiens

Les proches aidants sont souvent mal renseignés et peu accompagnés. Et puis, c’est toujours compliqué de reconnaître qu’on a besoin d’aide. Il faut d’abord l’accepter. Il faut ensuite savoir vers qui se tourner. 

Face à la réalité de ce phénomène qui tend à s’amplifier, et dans la mouvance encore récente du droit au répit pour les aidants, le monde de l’entreprise réagit en créant la fonction de Care Manager pour détecter les comportements à risques et les troubles chez les aidants. Par extension, ce manager va vite se transformer en conseiller, voire incarner une certaine forme de relais. Puis naturellement, en deux temps, trois mouvements, ce métier s’affranchit des ressources humaines et s’autonomise pour devenir une solution novatrice de la Silver économie.

Mais en quoi consiste précisément ce travail ?

Quels sont les contours de ce nouveau métier ?

Les contours d’un nouveau métier

Il y a deux notions clés autour desquelles va s’articuler la mission de soutien du Care Manager pour soulager la charge des aidants. Le principe moteur de maintien à domicile de la personne âgée, auquel va s’adjoindre une notion de complexité.

En effet, si le care management consiste à proposer aux aidants des solutions adaptées pour faciliter le maintien à domicile d’un proche concerné par la perte d’autonomie, la lisibilité des aides et des offres de services est souvent compliquée en raison du cloisonnement des services sur les territoires. De plus, la complexité des procédures peut transformer toute démarche en véritable parcours du combattant.

Dans ce contexte, le Care Manager apporte une expertise pour répondre aux questions des personnes âgées comme des aidants, les accompagner dans toutes leurs démarches (ou les entreprendre pour eux), les aider au quotidien et leur faciliter la vie.

Concrètement, il effectue une analyse de chaque situation. Il établit d’abord une sorte de diagnostic. Par la suite, il examine les différentes possibilités d’accompagnement, joue son rôle de conseil et propose une solution adaptée aux besoins particuliers de chaque situation, en tenant compte des financements à pourvoir et en sélectionnant des prestataires. 

En fonction des besoins de mamie Paulette et du budget dont elle dispose (ou de celui de la famille), il va identifier, par exemple, le type d’intervention(s) dont elle a nécessité (ménage, repassage, soins médicaux, livraison de repas…) et la ou les société(s) de services à domicile qui propose (nt) les meilleures prestations.

Le Care Manager se charge ensuite de coordonner les différentes contributions d’aides et de soins à domicile. En effet, que ce soit aux côtés de l’aidant ou auprès de la personne concernée, le Care Manager va mettre en relation les professionnels adaptés à la situation. Il se chargera de coordonner l’action des différents acteurs en respectant les choix de vie de la personne accompagnée. 

Enfin, après avoir mis en relation la personne concernée ou son aidant avec les professionnels adaptés, le Care Manager réalise également un suivi pour veiller à la satisfaction. 

Ces pays qui ont créé le job avant nous

Ce nouveau métier, ce n’est pas nous qui l’avons inventé. Plusieurs pays tels que la Suède (1990), le Canada (1996), le Japon (2000), l’Allemagne (2009) ou encore le Danemark (2010) ont développé des systèmes de care management. Ils permettent de coordonner et d’auditer les prestations de services reçus par les personnes âgées dépendantes. 

Selon l’Institut Montaigne, dans tous ces pays qui ont mis en place un métier de moniteur de services, les responsabilités du Care Manager se ressemblent et regroupent quatre fonctions : 

  1. l’évaluation de la situation,
  2. la définition du plan d’aide,
  3. la coordination des services,
  4. Le contrôle de la qualité des services.

La principale différence qui existe pour cette fonction entre certains de ces pays, c’est l’employeur. Si le Care Manager est un employé municipal en Suède, au Japon et au Danemark, il travaille pour un organisme public au Canada, et pour la Caisse d’assurance en Allemagne. 

En France, en revanche, tout porte à croire que l’on assiste à une privatisation de cette fonction, avec l’émergence de nouveaux acteurs qui professionnalisent le service, allant parfois jusqu’à créer de véritables plateformes.

Des services, des plateformes, et des outils numériques

Autrefois, on parlait de majordome, penseront certains. Aujourd’hui, on peut dire conciergerie, Care Manager ou encore Autonomie Planner. Cette nouvelle profession a le vent en poupe. Elle comble une case laissée vide par les différents acteurs de terrain en répondant à toutes les questions que se posent les personnes âgées et leur entourage. 

La société Marguerite, fondée en 2019, réalise cette prestation en mode distant (par téléphone) et elle s’associe aujourd’hui à Alogia pour étendre ce service. La Silver Alliance a elle aussi créé un service ce Care Manager en 2020. Citons aussi le projet Autonomie Planners, dont la particularité est de proposer d’abord des acteurs de terrain, qui se déplacent chez les gens. Né à Aix, le projet doit encore fait la preuve du concept puisque la société existe seulement dans deux agglomérations pour le moment.

Evoquons enfin Amapa et son service Sidonie. C’est une autre offre pour les aînés en perte d’autonomie qui souhaitent rester le plus longtemps possible à leur domicile. Le service allie un accompagnement au quotidien ainsi qu’un suivi santé et sécurité régulier. L’ensemble des prestations est coordonné en temps réel grâce à un cahier de liaison numérique accessible par tous les proches.

Enfin, en s’appuyant sur des outils numériques qui permettent une coordination optimisée des interventions et des aidants, à base d’agendas partagés et de prestataires listés, on assiste aussi à l’émergence de plateformes comme Coorganiz.

Combien ça coûte ? 

La facturation d’une prestation de care management suit assez logiquement le cycle de mise en œuvre du service. Une phase initiale de démarrage des solutions sur mesure à domicile ou en établissement, et une seconde phase de coordination, le plus souvent sous forme d’abonnement mensuel.

Généralement, la phase 1 de conseil, de recherche de la meilleure solution et de prestataire(s), en fonction des besoins et de la complexité de la demande, varie entre 200 et 800 euros. Le prix va dépendre également de la nature de l’intervention (par téléphone ou avec une visite diagnostic au domicile). Le suivi et la coordination en phase 2, toujours en fonction du niveau de coordination et de la nature des interventions, vont s’échelonner d’un abonnement mensuel allant d’une grosse centaine d’euros à 500 euros environ

Comment financer son Care Manager ?

Aujourd’hui, cette prestation n’est pas reconnue par l’APA et la PCH, elle n’est donc pas remboursée. Néanmoins, elles bénéficient du crédit d’impôt de 50 %, ce qui représente tout de même une belle déduction fiscale.

Signalons que la commercialisation de ce type de prestations se heurte en France à une contradiction. Comme évoqué, nous constatons que notre pays s’oriente vers la privatisation du service alors même que nous avons une culture nationale de la gratuité. Nous ne payons quasiment jamais les soins à leur juste prix. Si les particuliers, aidants comme aidés, plébiscitent unanimement les nouveaux services, ils restent en majorité réticents – voire résilients – quand vient le moment de payer.

Il est donc fort à parier que les professionnels du secteur vont chercher à construire leur développement en misant sur un financement par les caisses mutualistes ou de grands organismes (bailleurs sociaux, retraites…)

Une opportunité pour les métiers du domicile

Nous avons beaucoup insisté sur la vocation originale d’accompagnement pour le maintien à domicile, en soutien aux proches aidants. Le Care Manager n’est pourtant pas limité à la sphère privée, dans le domicile historique d’un senior. Un Care Manager aura aussi toute sa place pour aider des seniors vivant en habitat collectif. 

Les différentes formules d’habitat collectif senior sont un outil essentiel dans la lutte contre l’isolement. Ils contribuent à préserver l’autonomie et permettent aux personnes âgées de rester vivre sur le territoire qu’elles affectionnent. Ces habitats collectifs de formes variées pourraient également permettre le développement de la profession de Care Manager. En outre, le tarif individuel serait réduit grâce aux systèmes de de mutualisation. Lorsqu’il intervient pour un groupe, le Care Manager est payé par un collectif et non plus par un individu isolé.

Dans un contexte de recherche de solutions pour répondre aux enjeux du vieillissement de notre population, le Care Manager peut être présenté comme un métier d’avenir, valorisant le statut de travailleur social et redéfinissant le contour de ses missions. En effet, selon le Conseil de l’âge parut en 2019, le Care Manager a pour mission de renforcer l’intégration et la coordination du sanitaire et du social auprès des personnes âgées.

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2 réflexions sur “Le care manager, métier d’avenir ?”

  1. Sandrine Engeldinger

    Bonsoir, avant Autonomie Planner avec Victor Perrazi à Aix en Provence en 2019 (anciennement Bonjour Victor), qui m’avait contactée pour en savoir plus sur mon projet, il y a eu Senior Serenity en 2016 à Lambesc (13). J’ai eu ce projet d’accompagnement des personnes âgées à domicile et en EHPAD, après 5 ans d’expérience en tant qu’assistante administrative en EHPAD; C’est le manque d’informations des familles et les « placements » d’urgence qui m’ont ouverte sur cette création d’entreprise. J’ai quitté mon poste en décembre 2015 pour lancer mon activité de conseillère en gérontologie (c’est ainsi que j’avais nommé mon nouveau métier). Ce projet m’a amené par la suite à créer un magazine papier gratuit pour les seniors, du même nom, afin de diffuser l’information manquante aux familles, gratuitement, car les moyens financiers des clients que je rencontrais étaient trop faibles… J’en étais arrivée à faire du social uniquement…

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